vendredi 17 octobre 2014

Notre escapade à Septmonts et à Soissons


Chers amis,


Le Conseil d'Administration des Amis de la cathédrale de Châlons-en-Champagne, vous remercie très sincèrement pour votre participation à ce voyage et pour votre bonne humeur durant celui-ci. Sachez qu'il est très touché par votre présence assidue et votre fidélité.

La météo, au départ, n'était guère favorable. Dès potron-minet le brouillard régnait et, durant la traversée de Fismes ce fut une pluie fine qui nous accompagna. Nous arrivâmes cependant  à Septmonts à l'heure prévue et sans encombres.
 


 
La tradition orale transmet que le pape Jean VIII, né à Rome, de passage dans cette belle vallée aurait donné le nom de Septmonts à ce lieu en pensant à la ville éternelle dont il fuyait l'insécurité. Il se rendait vraisemblablement au concile de Troyes en l'an 878. Compliment flatteur s'il en est.

C'est à partir du XIIème que les évêques de Soissons eurent une résidence, déjà certainement fortifiée, à Septem Montes.

 
L'évêque Simon de Bucy, dont l'épiscopat s'étendit de 1362 à 1404, soucieux de protéger la population et sa très sainte personne, donna au château la force et l'élégance que l'on lui connaît aujourd'hui.



 
C'est Monsieur Denis Rolland, président de la Société Historique de Soissons, qui nous expliqua l'histoire de ce majestueux donjon et des autres bâtiments de cet ensemble castral. Avec lui nous gravîmes les 120 marches de cette tour, haute de 43 mètres, en découvrant à chaque niveau une belle cheminée, de belles arcatures, quelques décors sculptés et de beaux  panoramas sur le parc, d'un  côté, et sur le village, de l'autre.

Nous remarquâmes tous le grand soin apporté à la construction des murs de cet ensemble avec un bel appareillage de belles pierres du Soissonnais.


 
Une bien belle et surprenante découverte de ce château, mais aussi de ce charmant village à l' architecture toute particulière.

Un très grand nombre de maisons anciennes possèdent de charmants pignons dits à pas de moineaux,ou à redents, et donnent une ambiance médiévale à cette commune.

Le célèbre écrivain Roland Dorgelès écrivait " le style curieux du Soissonnais qui dresse vers le ciel ses pignons à redents comme d'insolites escaliers où grimpe le soleil ".

De retour dans le car, Sylvette Guilbert nous expliqua que la condition de l'évêque de Soissons était tout à fait similaire à celle de l'évêque de Châlons.

Ils étaient tous deux pairs de France et possédaient une résidence fortifiée à l'extérieur de leur évêché : Septmonts pour l'évêque de Soissons et Sarry pour l'évêque de Châlons, avec cependant une différence notoire. Si l'évêque de Soissons devait partager le pouvoir sur la ville avec le comte et la commune, l'évêque de Châlons était pair de France, on l'a dit, mais aussi comte de la ville depuis 1065 et ambassadeur du roi. Comme l'évêque de Soissons il avait le droit de basse et de Haute justice mais, en plus, il battait monnaie.

Du château des évêques comtes de Châlons il ne reste que deux pavillons d'entrée. La révolution française a détruit le reste. Simon de Bucy, fondateur du château de Septmonts, était même le petit-fils d'un chanoine de Châlons. Merci à Madame Guilbert pour son intervention savante.

Après le déjeuner, Monsieur Rolland nous fit une petite conférence sur l'histoire de la ville de Soissons de l'Antiquité à nos jours.

Notre temps étant compté, nous reprîmes notre car en direction de la cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais.

Celle-ci paraît bien isolée, sur la place Mantoue. Ceci à cause des nombreuses destructions tant dues à la révolution française qu'au premier grand conflit mondial du XXème siècle. Durant l'époque médiévale, elle était insérée dans un ensemble réunissant les quartiers épiscopal et canonial. Bien d'autres édifices, dans d'autres villes, présentent cet aspect, comme notre cathédrale Saint-Etienne qui a perdu également son palais épiscopal et son cloître canonial.

La construction de l'édifice actuel débuta vers 1176. Ce dernier quart de ce XIIème siècle correspond dans beaucoup de régions à une période de transition entre la fin du premier âge gothique et le début de l'art gothique classique.

 



Un fois le portail ouest franchi, on est ébloui par ce long et profond vaisseau de lumière, contrastant d'ailleurs avec la grande austérité de sa façade.

Le transept est d'une richesse remarquable. Le croisillon sud, partie la plus ancienne de l'église, est un chef d'œuvre du premier âge gothique. Il présente une abside arrondie sur quatre niveaux et l'ensemble est en forme d'hémicycle. Le croisillon nord est lui aussi un véritable joyau avec sa verrière magnifique typique de l'art gothique rayonnant. Il est, de plus, orné de deux tableaux : l'Adoration des Bergers de Rubens et la remise des clés à Saint-Pierre, 1624, de Philippe de Champaigne.




L'art gothique rayonnant irradie de lumière les églises et les cathédrales. Les parements de pierres inutiles sont remplacés par de magnifiques verrières et rosaces non moins superbes qui éclairent de couleurs chatoyantes les pavages de pierre de ces édifices.

Le chœur à cinq chapelles rayonnantes présente la même architecture à trois niveaux que la nef. De magnifiques vitraux des XIIIème et XIVème siècles ornent les fenêtres hautes. Une tapisserie du XVème siècle raconte la vie des deux saints patrons de la cathédrale.

Si l'extérieur de la cathédrale n'est pas particulièrement séduisant, le chevet présente, toutefois, des arcs-boutants à deux niveaux ou volées et de puissantes culées. C'est une innovation que l'on retrouve à Chartres, mais plus perfectionnée.

Nous quittâmes la cathédrale vers 16h. pour rejoindre l'abbaye Saint-Jean-des-Vignes, en passant par la chapelle Saint-Charles, seul vestige du grand séminaire fondé en 1682. Grande fut notre surprise lorsque nous découvrîmes, en haut de la colline St Jean, les ruines imposantes de cette ancienne abbaye.




 
Photos : Michèle Jacquet et Claude Lafauche

En observant le portail et les deux flèches élancées de l'abbatiale, on peut s'imaginer facilement la magnificence de ces lieux au XIIIème siècle. Fondée en 1076, l'importance de la communauté de 80 chanoines imposa un agrandissement des lieux. Le cloître, le magnifique réfectoire, le cellier et l'abbatiale en sont les témoins les plus significatifs. Il se dégage de ces murs une sérénité et un raffinement rarement égalés.

Lieu de culture qu'elle était, cette abbaye l'est toujours par la présence, dans ses murs, du Centre Départemental d'Archéologie et du Centre d'Etude des Peintures Murales Romaines. L'importance de cette cité à l'époque gallo-romaine explique la présence de ce dernier centre. Les vestiges d'un théâtre romain témoigne d'une agglomération romaine florissante.

Après la défaite du général romain Syagrius face au jeune roi franc Clovis, la cité deviendra royale durant l'époque mérovingienne. Le jeune vainqueur garda Soissons comme capitale et son fils Clotaire construira un mausolée royal, la future abbaye Saint-Médard. La crypte de Saint-Médard est la seule partie de l'église à avoir échappé aux démolitions massives de la révolution française.

Nous ne pûmes quitter Soissons sans évoquer cette scène cruelle du coup de hache mortel asséné par le jeune roi franc Clovis à l'un de ses soldats qui l'avait offensé lors du partage de butins suite aux pillages de plusieurs églises. A cette époque Clovis était encore païen. Grégoire, évêque de Tours, relate dans son Histoire des Francs, au VIème siècle, la contestation d'un soldat impétueux sur la restitution à un évêque d'un vase volé par les troupes de Clovis. Ce soldat envieux aurait frappé de sa hache de guerre le beau vase, qui finalement fut restitué à l'homme d'église.

Hincmar, archevêque de Reims au IXème siècle, rédigea la vie de Saint-Remi et dit, lui, que le vase devint la propriété de l'église de Reims. Une seule certitude cependant, le partage du butin a bien eu lieu à Soissons.

Cette scène est taillée sur le monument aux morts de la ville situé sur la place Fernand Marquigny, entre le chevet de la cathédrale et les vestiges romans de l'abbaye Notre-Dame, la plus ancienne de Soissons.

Sur ces dernières émotions, nous reprîmes le car qui nous ramena paisiblement dans notre cité.

Une bien sympathique sortie, ma foi !

Je vous transmettrai très prochainement les dates de nos prochaines activités préparées à votre intention.

A très bientôt.

Très cordiales salutations.

Claude Lafauche 


 

dimanche 17 août 2014

Sommaire des articles parus dans nos bulletins.

Chers amis,

Afin de faciliter vos recherches nous vous proposons ci-dessous les intitulés de tous les articles parus dans nos bulletins :

Bulletin n°1 : novembre 2009.

- La cathédrale de Châlons, présentation générale. 1er épisode : la cathédrale romane, par Alain Villes.
- La bulle de Pascal II du 25 mai 1107 pour Saint-Etienne de Châlons, par Jean-Baptiste Renault.
- Le Christ de douleur de la cathédrale de Châlons-en-Champagne, par Maxence Hermant.
- La bibliothèque du chapitre de la cathédrale en exposition du 6 octobre au 9 novembre 2009.
- La restauration de l'orgue John et Eugène Abbey de la cathédrale Saint-Etienne de Châlons-en- Champagne, par Eric Brottier.
- 20 ans autour de la cathédrale : chronique bibliographique. Monographies, Architecture et Sculpture, Mobilier et vitraux, Histoire du chapitre et des évêques, Vie liturgique et musicale, Environnement.

Bulletin n°2 : septembre 2010.

- De Saint-Etienne de Châlons à Saint-Martin de Vertus, en passant par Saint-Ephrem de Jâlons-les-Vignes : trois cryptes, trois témoins remarquables de l'art roman en Champagne châlonnaise, par Alain Villes.
- La cuve baptismale de la cathédrale de Châlons-en-Champagne, par Jacques Wersinger.
- Les usuaires médiévaux du chapitre cathédral de Châlons, par Brigitte Prévot;
- " Sigilli nostri impressione signavimus " : images et identités sigillaires des évêques, par Arnaud Baudin.
- Jean-Jacques Arveuf ( 1802-1875 ) et le buffet d'orgue de la cathédrale de Châlons, par Sylvain Mikus.
- Deux statues d'Arthur Guéniot à la cathédrale de Châlons, par Sylvain Mikus.

Bulletin n°3 : 2011.

- La cathédrale de Châlons, présentation générale, 2ème épisode : la cage de verre, par Alain Villes.
- La cuve baptismale de la cathédrale de Châlons-en-Champagne : la sculpture des fonts baptismaux, par Jacques Wersinger.
- Un chanoine mécène au XVIIIème siècle, Toussaint Lemaître de Paradis, par Jean Fusier.
- Les Muller, des musiciens au service de Châlons et de sa cathédrale au XIXème siècle, par Sylvain Mikus.

Dossier-excursion : Sarry, Francheville, Coupéville et Saint-Amand-sur-Fion.
- Visite de trois églises paroissiales dotées de galeries-porche, par Alain Villes.
- Le vitrail de Francheville, par Jean-Baptiste Renault.

Bulletin n°4 : 2012.

- Sépultures épiscopales médiévales dans la cathédrale Saint-Etienne de Châlons-en-Champagne.
   Pierres tombales disparues, par Sylvette Guilbert.
- Les anciennes orgues de la cathédrale de Châlons ( XIIe-XIXe siècles ), par Arnaud Guillerez et Sylvain Mikus.
- Le séjour de Jacobs d'Hailly, gentilhomme lillois, à Châlons en 1695.

Conférences des Nuits des Cathédrales 2011 et 2012 :
- La vie liturgique d'une cathédrale à l'époque classique (XVIIe-XVIIIe siècles), par don David Gilbert.
- La " lumière d'en haut qui vient nous visiter " (Lc 1,78) : la cathédrale et la spiritualité chrétienne de la lumière, par don Rémi Lanavère.
- Un mémorial de lumière. Les vitraux archéologiques du bas-côté nord de la cathédrale de Châlons et leurs donateurs, par Sylvain Mikus.

Bulletin n°5 : 2013.

Connaître la cathédrale :
- La grande flèche de 1520-1668 sur la tour nord de la cathédrale de Châlons-en-Champagne,par Alain Villes.
- Les anciennes orgues de la cathédrale de Châlons (XIIe-XIXe siècles).
  Deuxième partie : l'orgue de Jacques Cochu (1750-1795), par Arnaud Guillerez et Sylvain Mikus.
- La cathédrale Saint-Etienne de Châlons et son saint patron, par Jacques Wersinger.


Bulletin n°6 : 2014;

Connaître la cathédrale
- Châlons-en-Champagne, le quartier de la cathédrale au Bas-Empire, par Michel Chossenot.
- Saint-Amand-sur-Fion au Moyen-Age, domaine ancien de Saint-Etienne de Châlons, par Jean-Baptiste Renault.
- Les musiciens à la cathédrale de Châlons-en-Champagne dans la seconde moitié du XVIIIè siècle, par Jean Fusier.
- Les anciennes orgues de la cathédrale de Châlons (XIIè - XIXè siècles). Troisième partie - les orgues post-classiques (1808-1846), par Arnaud Guillerez et Sylvain Mikus.
- Histoire des stalles néo-gothiques de la cathédrale Saint-Etienne de Châlons-en-Champagne, par Sylvain Mikus.


Bulletin n°7 : 2015.

Connaître la cathédrale.
- Le chapitre de Saint-Etienne et ses moulins, par Paul Damagnez.
- Les musiciens de la cathédrale de Châlons-en-Champagne dans la deuxième moitié du XVIIIè siècle, par Jean Fusier.
- Les orgues de choeur de la cathédrale de Châlons-en-Champagne (depuis 1830), par Sylvain Mikus.
Présentations d'églises
- Champigneul, Matougues, Juvigny, Vraux, par Jean Fusier.
- Magenta, par Francis Leroy.





Nos bulletins sont disponibles à la vente à l'accueil de la cathédrale Saint-Etienne et à la librairie du Mau, place de la République.


Bonnes recherches et à très bientôt.
Bien cordialement.

CL











vendredi 11 juillet 2014

Notre sortie du 28 juin 2014

Au gré de la vallée de la Soude, découverte des églises de Dommartin-Lettrée, de Bussy-Lettrée et de la chapelle de Lettrée
Le nom Lettrée, commun aux trois sites visités, tire son origine  de la voie romaine qui reliait Châlons à Troyes. En latin la voie romaine se disait via strata, voie empierrée, ce qui a donné en vieux français l'étrée. De nombreux noms de villages reprennent  ce terme sous différentes formes.

Jean Fusier nous attendait dans l'église de Dommartin-Lettrée. Nicole Collard accueillit notre groupe avec gentillesse et prévenance. La petite pluie fine qui tombait et le passage d'un gros avion
au-dessus de l'église ne nous ont même pas découragés...

La clarté de l'église est surprenante, ainsi que l'ampleur de ses volumes. Sa construction débuta au début du XVIe siècle pour se terminer vers 1560. Les architectes de la Renaissance ont eu l'intelligence de conserver les colonnettes d'angle du chevet en témoignage de l'édifice précédent datant du XIIIe siècle..
Son unité n'est qu'apparente puisque l'église fut construite en deux phases.
Vers 1500 l'on construisit le choeur et le transept proche de celui-ci dans le style flamboyant de l'époque.
Quant au second transept, la nef et la façade ont été construites entre 1550 et 1560 dans le style Renaissance.
L'on admirera, à l'extérieur, la rangée de pignons triangulaires qui donne à l'église Saint-Martin son allure majestueuse. Deux portails Renaissance s'ouvrent sur l'extérieur dont celui du sud abrité sous un porche. Dans l'unique voussure de son tympan sont représentés les douze apôtres groupés deux par deux. Les iconoclastes de la révolution française ont eu le bon goût d'épargner quelques symboles pour pouvoir aujourd'hui identifier certains d'entre eux : St André avec la croix, St Thomas avec une équerre, St Simon avec une scie, St Mathieu avec une hallebarde et une bourse, St Jacques le Mineur avec un bâton de pélerin et St Paul avec une épée.
Rentrons de nouveau dans l'église Saint-Martin : Tel un écrin elle contient quatre magnifiques statues : un christ en croix émouvant et une très belle vierge à l'enfant datant de l'an 1500, Saint-Martin, statue mutilée du XVIe siècle mais d'une très grande qualité et une très élégante et jolie Sainte-Marguerite sculptée vers 1500.
Saint-Martin, patron de l'église, était le fils d'un haut dignitaire militaire romain. Il naquit, en 316, en Hongrie, et se convertit très tôt au christianisme. Il embrassa la carrière militaire pour ne pas déplaire à son père et fut muté en Gaule pour sa parfaite connaissance de la région et de ses habitants. Il est dit qu'au cours d'une terrible nuit d'hiver il partagea son manteau avec un indigent, du moins sa doublure. Peu de temps après, le Christ lui serait apparu vêtu d'une partie de son manteau. Le glaive, fabriqué pour donner la mort, devint par ce geste de partage un objet de rédemption. Ermite ensuite, il devint évêque de la ville de Tours à son corps défendant, puisqu'il fut enlevé par les habitants et placé sur le trône épiscopal.
Quant à Sainte-Marguerite, elle était la fille d'un prêtre latin païen et, comme Martin, elle se convertit très tôt à la nouvelle religion. Son père, de colère, l'a mise à la porte et elle devint bergère dans la province d'Antioche où sévissait le bien nommé Olibrius.Le gouverneur romain de cette province, trouvant la demoiselle fort à son goût, la demanda, à plusieurs reprises, en mariage, et bien évidemment elle refusa ses avances.
De colère, il la fit emprisonner et lui fit subir une véritable passion dont celle d'être avalée vive par un dragon. Grâce à la croix qu'elle portait au cou, elle put ouvrir le ventre le la bête et en sortir indemne. C'est cet épisode qui est relaté, où l'on voit la jeune fille très élégante et jolie piétiner le dragon stupéfait de sa déconvenue. Elle est vêtue comme une jeune fille de qualité durant la Renaissance et elle porte une coiffe très distinguée. Sainte-Marguerite était vénérée par les femmes enceintes. Chercher pourquoi...

Reprenons la route en direction de la chapelle de Lettrée.
Cette chapelle de Lettrée date du XIIe siècle mais elle a été amputée de ses bas-côtés qui se dégradaient. L'on voit d'ailleurs de l'extérieur les arcatures restantes qui menaient aux bas-côtés. L"église diminuée suffisait amplement pour les vingt-cinq paroissiens fréquentant la chapelle.
Campée sur son petit promontoire, et entourée de son petit cimetière, elle paraît simple et un peu esseulée, mais une fois le seuil, franchi par la petite porte du bas-côté, l'espace est émouvant et le temps a dû s'arrêter longuement ici. L'intimité de ces lieux doit être ressentie par les visiteurs ayant la chance de visiter cette chapelle romane.

Une vierge à l'enfant datant du XIVe siècle, la plus ancienne statue médiévale de Champagne-Ardenne, est très touchante. Elle tient l'enfant debout sur sa cuisse gauche. Leurs regards se croisent et, ainsi, augmentent l'émotion de cette oeuvre archaïque au bon sens du terme, bien entendu.
Jeanne d'Arc aurait prié dans ce lieu avant de recevoir symboliquement les clés de la ville de Châlons, pour ensuite poursuivre le périple que l'on connaît .


Dernière étape de notre après-midi : L'église de Bussy-Lettrée à quelques lieues de la chapelle.
Cet édifice construit au cours des XIIe, XIVe, et XVIe siècles est très élégant. C'est la seule église halle à chevet plat de la région.
Elle est ornée à l'extérieur de deux portails : le portail ouest inclus dans cette belle façade romane, simple et harmonieuse à la fois, et le portail nord qui date du XVIe siècle avec un décor Renaissance.
L'architecture précédente n'est pas oubliée dans cette composition Renaissance. Grandes verrières, voûtes d'ogives et voussures sont encore existantes.
Ce portail est protégé par un porche.
Ce décor Renaissance s'inspire des ordres antiques et les grotesques, très en vogue, colonisent les portails de cette époque.
 
 

A la fin du XVe siècle, un jeune romain tomba dans un trou et s'écroula dans une sorte de grotte couverte de peintures étranges. D'où ce terme grotesques dérivé de grottes. En réalité ce jeune intrépide était tombé dans une des nombreuses salles qui composaient l'antique palais impérial de Néron, appelé La Maison Dorée. D'autres maisons patriciennes, ornées de peintures surprenantes, furent découvertes à l'époque et assimilées à des grottes, puisque enterrées.
Comme ceux de l'église de Dommartin-Lettrée, le portail et le porche sont habités de ces êtres hybrides, mi-hommes, mi-végétaux semblant se métamorphoser.
A noter qu'un des chapiteaux du portail du XIIe siècle est sculpté d'un être semblable à ces grotesques Renaissance. Un visionnaire notre sculpteur roman...
Sur le porche nord, le monogramme de Diane de Poitiers et d'Henri II est gravé en souvenir de leur passage incertain à Bussy... ou de l'amour que vouait son peuple au roi de France.

Entrons à l'intérieur . Nous sommes immédiatement surpris par l'espace et la lumière du lieu. Une certaine majesté se dégage de ces gros piliers et de ces voûtes richement sculptées et appareillées de nervures élégantes. Les clés de ces coûtes sont également richement décorées.
                                                                              
Les quelques chapiteaux existants décorent simplement, puisque aucune voûte ne repose sur eux, les arcs formerets s'encastrant directement dans le mur ou les piles.

Un magnifique retable en pierre meuble le chevet. Le Calvaire occupe le centre de l'oeuvre, à sa gauche est Le Portement de Croix et, à sa droite, la Résurrection. Une oeuvre admirable du XVIe siècle avec une perspective donnée par l'absence de remplissage des côtés du retable.

Des vitraux de qualité du XVIe siècle illuminent cet écrin et de remarquables oeuvres sculptées occupent l'espace : plusieurs vierges à l'enfant, un Saint-Sébastien et un personnage tenant un livre et une grappe de raisins, peut-être Saint-Vincent.

Monsieur Pierre Poupart, le maire de la commune, a pris la parole en cette fin de journée afin de nous expliquer les travaux de restauration de l'église.
L'édifice était fragilisé en soubassement car construit sur du remblai. Des travaux de soutènement ont été effectués, grâce à la volonté de l'équipe municipale et des habitants, afin de préserver ce joyau des affres du temps. Des interventions futures sont d'ailleurs programmées par le conseil municipal. Des carrotages et une grille dans le choeur sont prévus pour favoriser une meilleure aération de l'église.
Un grand merci à Monsieur Poupart pour son accueil chaleureux.
 

Vers 18h 00, nous avons pris congé de notre guide, Monsieur Jean Fusier, qui, avec sa verve et son érudition, a su nous passionner tout au long de cet après-midi.
A très bientôt pour d'autres aventures.
Très cordialement et merci à tous pour votre présence.

CL

Photographies : Michèle  Jacquet, Claude Lafauche et Alain Seurat.